LES VISIONS DE LA BIENHEUREUSE
CATHERINE DE MILAN
10 - La tentation du Christ dans le désert
Le premier dimanche de Carême, après avoir reçu avec révérence le Très Saint Sacrement du Corps du Seigneur, l'âme de la bienheureuse Véronique fut enlevée par un ange et elle eut une vision. Elle fut transportée en esprit dans un désert aride et devait y rester pendant l'espace d'environ sept heures.
Elle y a vu le Christ, tout seul, pâle, décharné et affamé, et ses vêtements étaient en lambeaux et poussiéreux. De loin, elle vit alors un autre homme s'approcher de lui. L'ange du Seigneur lui dit : « Celui que tu vois s'approcher du Christ, c'est le diable, l'ennemi méchant et acharné du genre humain ! Il s'est déguisé en homme. Cet homme (ou plutôt ce démon, déguisé en homme) paraissait très âgé et avait l'apparence d'un ermite. Sa forme et les traits de son visage suggéraient qu'il avait mené une vie de grande austérité, et son attitude était vénérable. En effet, si Véronique n'avait pas été prévenue par l'ange, elle aurait pu imaginer qu'il était un ancien saint du désert ou un saint ermite !
Le vieil homme portait avec lui un panier rempli de pierres de différentes formes et couleurs. Il les déposa sur le sol devant le Christ. Il prit la parole et dit au Christ : « Je vois que tu souffres terriblement de la faim, mon ami ! Si tu es le Fils de Dieu, dis à ces pierres de devenir du pain, et elles deviendront vraiment du pain. »
Mais le Seigneur répondit : « L'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. »
À ce moment-là, le démon abandonna son déguisement, de sorte que sa véritable identité devint visible. Il s'est emparé du Christ et l'a placé sur un lieu élevé. Là, il lui dit : « Si tu es le Fils de Dieu, jette-toi d'ici ! Car il est écrit : « Dieu commandera à ses anges qui te prendront dans ses mains, de peur que tu ne heurtes ton pied contre une pierre. »
Jésus lui répondit de nouveau en disant : « Il est aussi écrit : tu ne tenteras pas le Seigneur, ton Dieu ! »
Le diable, maintenant frustré et en colère, a pris une forme différente, encore plus horrible qu'auparavant. Il emmena Jésus sur une montagne extrêmement élevée, et il lui montra là-bas tous les royaumes et empires du monde, leurs gloires et leurs richesses. Il parla une troisième fois : « Tout ce que tu vois, je te le donnerai, si tu te jettes à mes pieds et si tu m'adores ! »
À ce moment-là, le diable avait pris un aspect encore plus hideux et plus effrayant, crachant des flammes âcres de ses narines et de sa bouche. Mais Jésus lui répondit sans crainte. « Va-t'en, Satan ! Car il est écrit : Tu adoreras le Seigneur, ton Dieu, et c'est Lui seul que tu serviras. » Alors le diable poussa un rugissement dissonant et horrible, si fort que la montagne elle-même trembla et sembla sur le point de s'effondrer.
Mais à ce moment-là, une grande assemblée de saints anges apparut, entourant le Sauveur d'une lumière rayonnante et le conduisant vers un lieu de beauté et de tranquillité miraculeuses. Ce qu'était cet endroit, Véronique n'a jamais pu le dire. Les anges enlevèrent soigneusement les vêtements en lambeaux du Christ et les remplacèrent par des robes d'une splendeur indescriptible, qui semblaient être une manifestation de la gloire de sa majesté divine. Et ils lui chantèrent un hymne de louange ineffable, que des mots interminables ne pourraient jamais suffire à décrire. Une table lui fut aussi préparée par les anges, et Véronique vit ces êtres célestes lui servir des plats de nourriture céleste, ayant en eux toute la douceur et la délectation, sur des assiettes d'or étincelant.
À ce moment-là, le Christ parla assez longuement à la bienheureuse Véronique, lui révélant des mystères merveilleux. Après cela, sa vision a pris fin et elle est retournée à ses sens corporels normaux.
À SUIVRE ...