culte marial

1854

NOTRE-DAME DU SACRÉ-CŒUR HONORÉE À ISSOUDUN

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Du 29 novembre 1932 au 3 janvier 1933, la Vierge Marie s’est montrée à cinq enfants de Beauraing (province de Namur), dans le sud de la Belgique, à quelques kilomètres de la frontière française. À la fin de ses apparitions, elle leur a montré son cœur comme un cœur d’or nimbé de lumière. 

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Les Chevaliers du Sacré-Cœur. Le 15 mars 1824, Jules Chevalier naît à Richelieu (Indre-et-Loire), en Touraine, au sein d'une famille pauvre qui n'a pas les moyens de lui payer l'entrée au séminaire. Il est baptisé le lendemain. « Peu de temps après mon baptême, ma mère me consacra à la Très Sainte Vierge et au Sacré-Cœur », écrira-t-il. Il souhaite apprendre le métier de cordonnier pour se payer lui-même ses études. Mais à 17 ans, la Providence veille déjà sur lui : son père se voit proposer le métier de garde forestier dans la région de Vatan (Indre), non loin d'Issoudun, dans le diocèse de Bourges. Cette nouvelle situation va permettre à Jules d'aller au petit séminaire du diocèse de Bourges puis au grand séminaire. C'est là qu'il découvre la dévotion au Sacré-Cœur. En effet, son professeur de théologie ajoute un complément à son cours, pour faire écho à la lettre pastorale de Mgr Guillaume Aubin de Villèle, archevêque de Bourges qui institue la dévotion au Sacré-Cœur dans son diocèse (en demandant qu’on fasse une messe par mois dans les paroisses pour que les hommes reviennent à l'Église). Subitement, Jules Chevalier découvre que Dieu nous aime avec un cœur d'homme, celui de Jésus. C'est pour lui une véritable découverte, à une époque où l’hérésie janséniste, plutôt forte en France, insiste de manière excessive sur la justice de Dieu. Se jouant de son nom, il décide de créer un groupe de prière et de réflexion au sein du séminaire qui s'appellera les « Chevaliers du Sacré-Cœur ». 

Un projet missionnaire. Ordonné prêtre le 14 juin 1851, Jules vit dans trois lieux différents du vaste diocèse de Bourges pour son insertion pastorale (Ivoy-le-Pré, Châtillon-sur-Indre et Aubigny-sur-Nère). En septembre 1854, il reçoit sa nomination pour Issoudun qu'il rejoint en octobre avec l’un de ses compagnons, Émile Maugenest. Tous deux aiment se remémorer leurs rêves de séminaristes et leurs ambitions missionnaires. Ils décident d’en parlent au curé d'Issoudun, l'abbé Crozat, qui approuve leurs ambitions et leur promet aide et soutien. Nous sommes à la veille de la proclamation du dogme de l'Immaculée Conception, le 8 décembre 1854. À Issoudun, on s'y prépare par une neuvaine de prière. Le Père Chevalier écrit un contrat avec la Vierge Marie dans lequel il spécifie qu'il la fera honorer d'une manière spéciale si elle donne un signe pour favoriser son projet missionnaire. 

Une aide répétée de la Providence.
 Le 8 décembre, au terme de la neuvaine, après la messe, une personne vient promettre au Père Chevalier un don de 20 000 francs or pour des missions, sans plus de précisions. Voilà que Marie a répondu favorablement à sa demande ! « Vous êtes l'envoyé du Ciel. C'est par vous que la Vierge Immaculée nous répond aujourd'hui ! », s'exclame le Père Chevalier. Il discerne avec l'archevêque de l'opportunité de créer l’institut missionnaire dont il a toujours rêvé. Mais le conseil épiscopal est sur la réserve, Mgr demande un temps de réflexion. Finalement, ce dernier reconnaît l’intervention de la Providence et accepte le projet du Père Chevalier, même si son conseil n'y est pas favorable. Début septembre 1855, la première communauté des Missionnaires du Sacré-Cœur est donc installée par le vicaire général de Bourges dans une modeste maison qu’on n’arrivait pas à vendre et qui deviendra l'actuel sanctuaire d’Issoudun. Le Père Chevalier transforme avec ses missionnaires une petite grange voisine en chapelle, mais l’effondrement de son toit convainc bientôt les Missionnaires de construire une église dédiée au Sacré-Cœur. 

Pour honorer Marie. Il revient au Père Jules Chevalier de tenir sa promesse à l'égard de Marie. Il s'en acquittera en 1857, après trois ans de réflexion et de prière : « Dans notre église, la Vierge Marie s'appellera : Notre-Dame du Sacré-Cœur. » Pour répondre à l'étonnement de ses confrères à l'écoute de ce nouveau titre, il s’exprime dans la revue des Pères jésuites de Toulouse, Le Messager du Sacré-Cœur. Le Père Chevalier explique vouloir honorer les liens qui unissent Marie et le Christ, le Christ et Marie. Il fera faire une première image où Marie debout, les bras ouverts, a devant elle l'enfant Jésus âgé de 12 ans qui bénit. Ce statuaire combine l'attitude de Marie à la rue du Bac (Paris) et Jésus emprunté à un tableau de la Sainte Famille de M. L. J. Hallez. Plus tard, le Père Chevalier fera faire une statue en marbre de Carrare selon la même idée, avec une variante : Jésus ne bénit plus. Le Père demande que, de sa main droite, l'enfant désigne sa mère comme pour nous dire : « Si vous voulez connaître mon cœur (qu'il désigne de sa main gauche), demandez à Marie, elle vous indiquera le chemin. » Le 2 juillet 1864, par une cérémonie grandiose, Mgr de La Tour d’Auvergne inaugurait la nouvelle église à peine achevée, reconnue basilique mineure par un décret de Pie IX du 17 juillet 1874. La statue de Marie, en marbre de Carrare, sera rapidement placée dans une chapelle dédiée à Notre-Dame du Sacré-Cœur.   

La porte du Cœur du Christ.
Ainsi, à Issoudun, Notre-Dame est liée à une personne (le Christ) et non à un lieu (Issoudun). Dans le sillage du Concile Vatican II et de son texte marial (voir le chapitre VIII de la constitution Lumen Gentium du 21 novembre 1964), et selon l'intuition spirituelle du Père Chevalier, une autre représentation de Notre-Dame du Sacré-Cœur voit le jour grâce au grand calvaire qui est dans le chœur de la basilique d'Issoudun. Marie debout au pied de la croix oriente nos regards et nos cœurs vers le Christ au cœur transpercé. De sa main droite, elle nous invite à aller à la porte de ce Cœur pour y puiser, nous aussi, les eaux vives du Salut. On se souvient que Jean-Paul II dira au terme du Jubilé de l'an 2000 : « Je viens de fermer la porte de l'année sainte mais la porte du Cœur du Christ demeure à jamais ouverte. » À la suite de saint Augustin, le Père Chevalier est sensible à cette notion de la « porte occasionnée par la blessure du soldat ».   

« Aimé soit partout le Sacré-Cœur de Jésus »

Des missionnaires reconnus. La société est approuvée par le pape Pie IX par des décrets du 12 juin 1874 et du 12 janvier 1877. Le 25 mars 1881, le Père Chevalier répond favorablement à l’appel du pape Léon XIII qui demande l'envoi de missionnaires en Mélanésie et en Micronésie (îles au nord de l’Australie). Ce nouveau champ missionnaire donne corps à son rêve qu'il synthétise dans la devise donnée à ses missionnaires : « Aimé soit partout le Sacré-Cœur de Jésus» (Ametur ubique terrarum Cor Jesu sacratissimum). Le pape François vient d'honorer cette dimension missionnaire, en choisissant parmi les cardinaux (le 19 novembre 2016), Mgr John Ribat, Missionnaire du Sacré-Cœur et archevêque de Port Moresby (Papouasie-Nouvelle-Guinée).

La « Famille Chevalier ». Après les Missionnaires du Sacré-Cœur (MSC), deux congrégations féminines ont vu le jour : les Filles de Notre-Dame du Sacré-Cœur (30 août 1874) et les Sœurs Missionnaires du Sacré-Cœur (25 mai 1900). Des laïcs MSC se sont aussi associés à la mission au sein de ce que nous appelons aujourd’hui la « Famille Chevalier » qui regroupe religieux, religieuses et laïcs. Les trois congrégations nées de l’ardeur missionnaire du Père Chevalier comptent aujourd'hui plus de 5000 membres dans 53 pays, sur tous les continents. Ils sont engagés dans la pastorale paroissiale, le monde des jeunes, les aumôneries d'hôpitaux, auprès des gens de la rue, à travers des pèlerinages et des retraites spirituelles. Un bulletin de liaison mensuel a été créé tant pour les pèlerins qui viennent nombreux découvrir Marie sous son nouveau vocable, que pour les membres de la Fraternité Notre-Dame du Sacré-Cœur (créée par le Père Chevalier) qui s'y rattachent. C'est ainsi que sont nées en janvier 1866 les Annales d'Issoudun qui existent encore aujourd’hui. 


À Issoudun de nos jours. L'ensemble du sanctuaire d’Issoudun porte le nom de Basilique Notre-Dame du Sacré-Cœur. Aujourd'hui, le sanctuaire est ouvert toute l'année. Il accueille les pèlerins qui viennent nombreux de Pâques à octobre de manière individuelle ou en groupe. Chaque jour, il y a la messe à 11h30 (11h le dimanche) et la prière mariale de 17h à 17h30 qui allie, dans une lectio divina avec Marie, la dimension mariale et les vêpres. Il y a aussi un enseignement sur le thème de l’année et des rencontres missionnaires sont proposées pour les groupes. Chaque jour, un accueil dialogue-confession est aussi offert de 9h30 à 11h et de 15h à 17h. Un thème annuel permet de déployer la riche spiritualité du Sacré-Cœur au sujet de laquelle le Père Chevalier aimait dire : « La dévotion à Notre-Dame du Sacré-Cœur est le complément naturel de la dévotion au Sacré-Cœur. » Le Serviteur de Dieu Jules Chevalier est mort le 21 octobre 1907 à Issoudun après une vie bien remplie et riche de promesses pour l'avenir. Sa cause en béatification a été déposée à Rome le 25 mai 2012. Sept de ses fils spirituels ont été déclarés martyrs en Espagne dans le contexte de la guerre civile de 1936-1939.

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Le titre de Notre-Dame du Sacré-Cœur expliqué par le Père Chevalier. 
 « Notre-Dame du Sacré-Cœur est le plus beau titre que l'amour et la foi puissent donner à Marie, après celui de Mère de Dieu. L’enfant de Marie, en l’invoquant sous ce nom si doux de “Notre-Dame”, se propose : 1° de remercier et de glorifier Dieu d’avoir choisi Marie entre toutes les créatures pour former dans son sein et de sa plus pure substance le Cœur adorable de Jésus ; 2° d’honorer – plus particulièrement – les sentiments d’amour, d’obéissance et de respect filial que Jésus a nourris dans son Cœur pour sa très sainte Mère ; 3° de connaître et de glorifier, par un titre spécial (...) la puissance qu’il lui a donnée sur son divin Cœur ; 4° de conjurer cette Vierge sainte de nous conduire elle-même au Cœur Sacré de son fils, de nous ouvrir les trésors d’amour et de miséricorde qu’il renferme et de nous faire plus abondamment puiser à cette source de toutes les grâces » (Le Messager du Cœur de Jésus, mai 1863). 

Le pape François, lors du chapitre général à Rome, septembre 2017 (audience privée) : 
« Si l’inspiration originelle du Fondateur a été celle de propager la dévotion au Sacré-Cœur de Jésus, aujourd’hui vous la comprenez et l’actualisez en l’exprimant dans une variété d’œuvres et d’actions qui témoignent de l’amour tendre et miséricordieux de Jésus pour tous, spécialement vers ces parties de l’humanité les plus nécessiteuses. Afin de pouvoir le faire, je vous invite – ainsi que je l’ai souvent rappelé aux personnes consacrées – à « retourner vers le premier et unique amour », à maintenir le regard fixé sur le Seigneur Jésus pour apprendre de Lui à aimer avec un cœur humain, à chercher et prendre soin des brebis perdues et blessées, à vous engager pour la justice et la solidarité avec les plus faibles et les pauvres, à donner de l’espérance et la dignité à ceux qui le demandent, à aller partout où un être humain attend d’être accueilli et aidé. En vous envoyant comme Missionnaires, c’est cela le premier Évangile que l’Église vous confie : dans vos personnes et avec vos œuvres, montrer l’amour passionné et tendre de Dieu pour les petits, les derniers, les sans défenses, les écartés de la terre. »  

Discours du cardinal Joseph Lefèbvre, archevêque de Bourges, sur la dévotion à Notre-Dame du Sacré-Cœur (8 septembre 1969).
 
Le cardinal Joseph Lefèbvre, archevêque de Bourges (et alors président de la Commission Doctrinale des évêques de France) déclare lors du centenaire du pèlerinage (8 septembre 1969) devant 15 000 pèlerins : « Laissez-moi vous rappeler le sens profond de la dévotion à Notre-Dame du Sacré-Cœur. Il ne s'agit pas d'une dévotion parmi d'autres. J'oserai dire qu'elle est « LA » dévotion par excellence […] parce qu'elle va directement à l'essentiel. C'est sur le Christ et sa Mère que la dévotion concentre nos regards […]. La dévotion nous conduit à mieux connaître – et partager – l'amour de Jésus – et celui de Marie – pour Dieu et pour les hommes. […] Puissions-nous vivre vraiment la dévotion, et nous en faire les apôtres ! Alors nous contribuerons efficacement à obtenir, par Notre-Dame du Sacré-Cœur, que partout et toujours soit honoré et servi, pour la plus grande gloire de Dieu et le plus grand bonheur des hommes, le Cœur de Jésus Christ » (Texte intégral : ANNALES d'Issoudun, novembre 1969).   

Selon les propos du Cardinal Lefèbvre, il s'agit donc d'une spiritualité « mariale et missionnaire ». Et c'est bien poussé par son amour du Cœur de Jésus, son amour de l'Église et sa confiance extraordinaire en Notre-Dame du Sacré-Cœur, que le P. Chevalier accepte en 1881 l'immense vicariat apostolique de Mélanésie et de Micronésie. Il n'avait alors que quelques confrères. C'est un coup de folie que de vouloir cette option missionnaire. Dans sa réponse à Rome, Chevalier fait explicitement référence à Notre-Dame. Il signale que la lettre du Saint-Siège est datée du 25 mars 1881 : « Cette date est significative. C'est le jour que le Ciel a choisi pour annoncer la nouvelle du Salut par l'Incarnation du Verbe. C'est aussi le jour que Léon XIII a choisi pour nous proposer, par son messager fidèle, la mission de la Mélanésie et Micronésie. » Et il ajoute : « À l'exemple de Marie, nous avons fait connaître, avec simplicité, notre insuffisance notoire et nos légitimes inquiétudes. […] Notre humble Congrégation répond avec la Vierge de Nazareth « Voici la servante du Seigneur, qu'il me soit fait selon votre parole » » (Lettre du P. Jules Chevalier au Cardinal Siméoni, 16 avril 1881). 
Un grand nombre des « missions » ad extra (ou Jeunes Églises) des Missionnaires du Sacré-Cœur  sont confiées à Notre-Dame du Sacré-Cœur (chapelles, sanctuaires, patronage d'un diocèse, etc.). Grâce à la grande diffusion de la dévotion, les Missionnaires du Sacré-Cœur ont coutume de dire que « Notre-Dame du Sacré-Cœur les a souvent précédés sur leur champ apostolique » (par une image, un statue, une chapelle, ou un groupe de laïcs de la Fraternité N.D. du S.C.).  

Père Daniel Auguié - mariedenazareth.com

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