Saint-Laurent de Brindisi
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   Jean, Apôtre et Évangéliste, le disciple bien-aimé du Christ,  le fils en qui la Très Sainte Vierge, Mère de Dieu, mit sa préférence après la  crucifixion, eut beaucoup à souffrir pour la foi en Jésus Christ pendant son  exil sur l'île de Patmos.
       Mais, en même temps, il y fut aussi consolé par Dieu au moyen de  nombreuses révélations célestes. En effet, St Paul dit : 'Car, tout comme les  souffrances du Christ abondent en nous, notre consolation abonde en Christ' (2  Corinthiens 1, 5). Et de même, dans les Psaumes, nous lisons : 'Quand les  pensées s'agitent en foule au-dedans de moi, tes consolations réjouissent mon  âme' (Psaume 94(93), 19).
       Jean avait reposé sa tête sur la poitrine du Seigneur à la  Sainte Cène, il avait aussi choisi Marie comme la meilleure part qui ne lui  serait pas retirée (Luc 10, 42).
       Grâce à cette extraordinaire dévotion qui le caractériserait, il  fut, après l'ascension du Seigneur Jésus Christ dans le Ciel, absorbé pour  toujours dans la contemplation du divin. Mais c'est avec plus d'ardeur encore  qu'il se consacra aux choses divines alors même qu'il était en pleine  tribulation. Voilà bien ce que font les saints.
       Pendant ces temps d'épreuves, Jean, "dévoré par un feu  d'amour toujours plus ardent et élevé sur les hauteurs par les flammes  séraphiques de cet amour, fut plongé en Dieu. Il commença alors à déborder de  cette douceur divine qu'apporte la contemplation, bien plus abondamment et  copieusement qu'à l'accoutumé ; de même, il expérimenta plus parfaitement les  dons que procurent les visites célestes." (St Bonaventure).
       Dieu, 'le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation,  qui nous console dans toutes nos afflictions' (2 Corinthiens 1, 3-4), consola  Jean, tout comme il avait consolé autrefois le patriarche Jacob par la vision  de l'échelle céleste (Genèse 28, 12-16) ou Moïse par l'apparition divine du  buisson ardent (Exode 3, 2-5), ou bien encore les trois jeunes gens dans la  fournaise qu'Il réconforta en envoyant un ange consolateur, accompagné d'une  bienfaisante fraîcheur céleste (Daniel 3, 49-50) ; sans oublier Paul qui fut  ravi au troisième Ciel, qui n'était autre que le Paradis lui-même. Dieu l'y  consola et l'y revigora d'une manière ineffable par la vision de la gloire  céleste (2 Corinthiens 12, 2-4).
       I) Jean, Apôtre et Évangéliste, le disciple bien-aimé du Christ,  le fils en qui la Très Sainte Vierge, Mère de Dieu, mit sa préférence après la  crucifixion, eut beaucoup à souffrir pour la foi en Jésus Christ pendant son  exil sur l'île de Patmos.
   Mais, en même temps, il y fut aussi consolé par Dieu au moyen de  nombreuses révélations célestes. En effet, St Paul dit : 'Car, tout comme les  souffrances du Christ abondent en nous, notre consolation abonde en Christ' (2  Corinthiens 1, 5). Et de même, dans les Psaumes, nous lisons : 'Quand les  pensées s'agitent en foule au-dedans de moi, tes consolations réjouissent mon  âme' (Psaume 94(93), 19).
   Jean avait reposé sa tête sur la poitrine du Seigneur à la  Sainte Cène, il avait aussi choisi Marie comme la meilleure part qui ne lui  serait pas retirée (Luc 10, 42).
   Grâce à cette extraordinaire dévotion qui le caractériserait, il  fut, après l'ascension du Seigneur Jésus Christ dans le Ciel, absorbé pour  toujours dans la contemplation du divin. Mais c'est avec plus d'ardeur encore  qu'il se consacra aux choses divines alors même qu'il était en pleine  tribulation. Voilà bien ce que font les saints.
   Pendant ces temps d'épreuves, Jean, "dévoré par un feu  d'amour toujours plus ardent et élevé sur les hauteurs par les flammes  séraphiques de cet amour, fut plongé en Dieu. Il commença alors à déborder de  cette douceur divine qu'apporte la contemplation, bien plus abondamment et  copieusement qu'à l'accoutumé ; de même, il expérimenta plus parfaitement les  dons que procurent les visites célestes." (St Bonaventure).
   Dieu, 'le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation,  qui nous console dans toutes nos afflictions' (2 Corinthiens 1, 3-4), consola  Jean, tout comme il avait consolé autrefois le patriarche Jacob par la vision  de l'échelle céleste (Genèse 28, 12-16) ou Moïse par l'apparition divine du  buisson ardent (Exode 3, 2-5), ou bien encore les trois jeunes gens dans la  fournaise qu'Il réconforta en envoyant un ange consolateur, accompagné d'une  bienfaisante fraîcheur céleste (Daniel 3, 49-50) ; sans oublier Paul qui fut  ravi au troisième Ciel, qui n'était autre que le Paradis lui-même. Dieu l'y  consola et l'y revigora d'une manière ineffable par la vision de la gloire  céleste (2 Corinthiens 12, 2-4).
   C'est ainsi que Jean fut consolé de bien des manières. Souvent,  les cieux s'ouvrirent et souvent Dieu lui montra, comme il l'avait montré à  Etienne, la gloire du Paradis, la gloire du Christ, la gloire de Dieu. Souvent,  il le réjouit par la vue et le discours des anges, il le remplit d'une grande  joie. Souvent, le plus doux des sauveurs lui apparut du haut des cieux.  Souvent, il fut honoré de la vision de la gloire du Père. Ô bienheureux Jean  qui est béni encore et toujours en gage de l'amour divin - c'est parce que  Jésus l'a aimé.
   II) Une seule chose pouvait encore faire défaut. En effet, Jean  aimait le Christ par-dessus tout, de toute son âme et de tout son coeur. Il  L'aimait d'un amour parfait. Il L'aimait comme une jeune mariée chérit  tendrement un époux qui l'aime. C'est la raison pour laquelle Jean était rempli  d'une si grande joie à la vue du Christ. Mais personne n'ignore non plus qu'il  vénérait la Vierge Mère de Dieu, la Très Sainte Mère du Christ, de l'affection  qu'un enfant porte à sa mère. Tout le monde sait qu'il l'aimait d'une  affectueuse dévotion comme si elle avait été réellement sa chère et tendre  mère.
Jean avait conscience qu'après le Christ, la Vierge l'aimait  comme un fils très précieux. Le Christ lui-même n'avait-il pas dit à sa Mère en  parlant de jean : 'Voici ton fils' ? Et de même, n'avait-il pas dit à Jean en  parlant de sa Mère : 'Voici ta mère' ? Et 'le disciple', nous dit Jean, 'la  prit chez lui' (Jean 19, 26-27). Il la prit avec lui.
   Que possédait Jean en ce monde, je vous le demande ? Qu'avait-il  en propre celui qui, pour suive le Christ, avait tout quitté, père et mère,  etc…, et même son âme ? Comment prit-il la Vierge, Mère du Christ chez lui, lui  qui, ayant tout quitté, ne possédait rien qui fût à lui ?
   Il la considéra comme son trésor, elle était toute sa richesse,  tout ce qu'il possédait. Il vénérait la Vierge avec un amour et une noblesse  inimaginables. Cependant, quelques années seulement après l'ascension au ciel  du Seigneur Jésus Christ, Marie, aussi, fut enlevée par le Christ vers le  Royaume des cieux, afin que comme reine, elle pût se tenir à la droite du  Seigneur des Seigneurs, 'parée de l'or d'Ophir, entourée par une cours  nombreuse' (Psaume 45 (44), 10). C'est ainsi que l'Assomption de la Vierge eut  lieu vers la quinzième année qui suivit la mort du Christ. Mais Jean, quant à  lui, vécut encore jusqu'à l'époque de l'empereur Trajan. Quand Jean fut envoyé  en exil sur l'île de Patmos par l'empereur Domitien, un monstre d'une cruauté  atroce, la Très Sainte Vierge, qui était montée au Paradis le laissa vivre,  pour le bien de l'Église, dans cette vallée de larmes, selon la volonté du  Christ. Comme il savait que la Vierge était montée au ciel pour y être exaltée  à la droite du Christ, au-dessus de toutes les puissances célestes, Jean ne put  s'empêcher de se réjouir et d'exulter en son âme.
   Mais, privé de la douce conversation de la Vierge, ainsi que de  la consolation et du réconfort divins, il ne put pas non plus ne pas laisser  échapper larmes et lamentations quant à son sort. La Vierge n'ignorait pas du  tout la situation de Jean. Doit-on penser qu'elle l'oublia ? Comment  aurait-elle pu oublier celui qu'elle chérissait tendrement en son cœur de mère  comme si ce fut le Christ ?
   L'échanson ingrat de Pharaon oublia en prison Joseph qui était  innocent. Mais Marie ne pouvait pas oublier Jean. On peut donc fort bien penser  que la Très Sainte Vierge descendait souvent du ciel pour lui rendre visite et  le consoler, à la manière d'une mère qui a consolé son fils unique, un fils qui  ne manque pas de l'aimer en retour.
III) Il semble que Jean ait voulu conserver la trace d'une  apparition particulière de la Vierge pour en faire un mémorial définitif quand  il écrivit : "Un grand signe apparut dans le ciel : une femme enveloppée  du soleil, la lune sous ses pieds et une couronne de 12 étoiles sur sa  tête." (Apocalypse 12, 1).
   Selon Épiphane, Bernard, Rupert et d'autres Pères encore, Jean  parle ici de la Vierge, Mère de Dieu. Jean lui-même semble le sous-entendre.  Non, en fait, il paraît bien avoir exprimé cette opinion le plus clairement du  monde, car il dit : "Elle enfanta un fils, qui doit paître toutes les  nations avec une verge de fer" (Apocalypse 12, 3). Par ces mots, c'est  sans aucun doute le Christ qu'il décrit, le Roi des rois et le Seigneur, le  Fils de Dieu, le seul engendré, le fils de la Vierge, Mère de Dieu. La Vierge,  Mère de Dieu, la mère du Christ, l'épouse de Dieu, la Reine du Ciel, la Reine  des Anges, apparut donc à Jean, vêtue de la gloire céleste, resplendissante de  la beauté et de la majesté divines : "Un grand signe apparut dans le  ciel".
   Par cette vision céleste, le Seigneur voulait montrer à Jean la  grande valeur de ce précieux trésor qu'il avait confié à sa garde, ce trésor  qui contient toutes les richesses et toute la gloire du ciel. A travers Jean,  Il désirait montrer à l'Église catholique universelle, c'est à dire à tous les  fidèles du Christ, combien la Vierge était exaltée au milieu des anges et des  élus du Paradis.
   Dieu agit ainsi de peur que nous pussions croire que Marie avait  été rejetée par Lui ; en effet, dans les Écritures Sacrées, l'Esprit Saint  avait fait la grâce à Marie de se sanctifier dans un certain effacement.
   IV) L'Écriture Sainte se montre étonnamment réservée et avare de  détails quand il s'agit de parler de la Vierge, il en est d'ailleurs de même  pour ce qui touche à la nature des anges et à la gloire du Paradis céleste.  Moïse, dans son récit des origines du monde, ne fait aucune mention de ces deux  derniers éléments. Il ne nous dit rien sur leur création, même si, sous  l'inspiration du Saint-Esprit, il raconte bien des choses au sujet de la  création du monde visible et du paradis terrestre, tout comme il le fait au  sujet de la formation de l'homme ; et c'est avec simplicité et véracité qu'il  raconte les nombreuses actions historiquement véridiques de Dieu et des hommes,  ceci afin de produire un témoignage qui traverserait les générations. Moïse  a-t-il eu du mépris pour les anges ou pour la création de la Jérusalem céleste,  alors même que leur Créateur, l'Artisan de leur existence, n'est autre que Dieu  ? Pourquoi donc a-t-il omis d'en parler ? La sagesse lui commanda de garder le  silence, car ce qu'il aurait pu dire dépassait la compréhension de notre esprit  et la capacité de notre intelligence. Epiphanus va dans le même sens quand dans  son Panarium, Haereses 78, il dit de la Vierge Mère de Dieu : "Les Écritures  restent silencieuses en raison de l'excellence du miracle, de peur que celui-ci  ne plonge l'esprit des hommes dans la stupeur." Aussi, les Saintes Écritures  ne disent-elles rien des parents de la Vierge ; elles ne disent rien non plus  de sa conception ou de sa naissance, contrairement à ce qui s'était passé pour  Jean Baptiste. Elles ne nous informent en rien sur l'âge de la Vierge, sa vie,  son caractère ou bien encore sa façon de vivre. Elles ne font même aucune  allusion à sa mort. C'est soudainement que la Vierge fait son apparition, à la  manière de Melchisédech, ce distingué prêtre de Dieu et Roi de Salem, lui dont  St Paul dit "qu'il était sans père, sans mère, sans généalogie, sans  commencement ni fin" (Genèse 14, 18 + Hébreux 7, 1-3), une affirmation  qu'il peut faire puisqu’aucun de ces renseignements ne figurent dans les  Saintes Écritures. C'est ainsi que la prêtrise fit son apparition, avec  majesté, comme si elle descendait du Ciel d'auprès de Dieu, ne tenant son  origine ni des hommes ni de la terre.
   Le silence, déclare le Prophète Royal, est louange à Dieu :  "Avec confiance, ô Dieu ! on te louera dans Sion." (Psaume 64, 1),  mais en Hébreu, nous avons : "Dans le silence, ô Dieu ! on te louera dans  Sion." En effet, comme rien de ce que l'on peut dire ne saurait constituer  une louange adéquate, il est préférable de s'émerveiller en silence devant le  divin plutôt que de bafouiller des mots pauvres et inadaptés ; c'est pourquoi  le Saint Esprit, qui inspira les saints hommes Dieu, voulut honorer la Mère de  Dieu dans ce silence sacré, ne révélant que cette vérité, à savoir qu'elle  était digne de devenir l'Épouse de Dieu pour concevoir et mettre au monde le  Fils unique de Ce dernier. La Très Sainte Vierge, en conséquence, fit son  entrée dans le monde non sans une certaine majesté divine : "L'Ange  Gabriel fut envoyé d'auprès de Dieu…vers une vierge…et quand l'ange fut près de  la Vierge il lui dit : Je te salue pleine de grâce, le Seigneur est avec  toi". (Luc 1, 26-28) Vraiment, "c'est un grand signe qui apparut dans  le ciel". Tout à coup, Marie surgit ; c'était comme une apparition divine  descendue du ciel, façonnée par la main experte de Dieu. Ève, la première mère  des vivants, avait été faite à l'image d'Adam, le premier homme, issu de la  terre. Marie, la femme céleste, a été faite à l'image du Christ, le deuxième  Homme, venu du ciel. Voilà pourquoi Jean déclare d'une voix forte : "un  grand signe apparut dans le ciel".
   V) Par cette vision céleste, Dieu souhaitait, autant que faire  se peut, montrer à la véritable Église les splendeurs divines dont Marie avait  été revêtues ; de même, Il désirait révéler aux fidèles les mystères que la  Vierge recelait.
   Ces révélations, Dieu les donna, afin que tous prissent  conscience, par les écrits la concernant, de la grandeur et de la magnificence  de la gloire dont elle avait été comblée.
    C'est ainsi que Jean fut consolé de bien des manières. Souvent,  les cieux s'ouvrirent et souvent Dieu lui montra, comme il l'avait montré à  Etienne, la gloire du Paradis, la gloire du Christ, la gloire de Dieu. Souvent,  il le réjouit par la vue et le discours des anges, il le remplit d'une grande  joie. Souvent, le plus doux des sauveurs lui apparut du haut des cieux.  Souvent, il fut honoré de la vision de la gloire du Père. Ô bienheureux Jean  qui est béni encore et toujours en gage de l'amour divin - c'est parce que  Jésus l'a aimé.
       II) Une seule chose pouvait encore faire défaut. En effet, Jean  aimait le Christ par-dessus tout, de toute son âme et de tout son coeur. Il  L'aimait d'un amour parfait. Il L'aimait comme une jeune mariée chérit  tendrement un époux qui l'aime. C'est la raison pour laquelle Jean était rempli  d'une si grande joie à la vue du Christ. Mais personne n'ignore non plus qu'il  vénérait la Vierge Mère de Dieu, la Très Sainte Mère du Christ, de l'affection  qu'un enfant porte à sa mère. Tout le monde sait qu'il l'aimait d'une  affectueuse dévotion comme si elle avait été réellement sa chère et tendre  mère.
       Jean avait conscience qu'après le Christ, la Vierge l'aimait  comme un fils très précieux. Le Christ lui-même n'avait-il pas dit à sa Mère en  parlant de jean : 'Voici ton fils' ? Et de même, n'avait-il pas dit à Jean en  parlant de sa Mère : 'Voici ta mère' ? Et 'le disciple', nous dit Jean, 'la  prit chez lui' (Jean 19, 26-27). Il la prit avec lui.
       Que possédait Jean en ce monde, je vous le demande ? Qu'avait-il  en propre celui qui, pour suive le Christ, avait tout quitté, père et mère,  etc…, et même son âme ? Comment prit-il la Vierge, Mère du Christ chez lui, lui  qui, ayant tout quitté, ne possédait rien qui fût à lui ?
       Il la considéra comme son trésor, elle était toute sa richesse,  tout ce qu'il possédait. Il vénérait la Vierge avec un amour et une noblesse  inimaginables. Cependant, quelques années seulement après l'ascension au ciel  du Seigneur Jésus Christ, Marie, aussi, fut enlevée par le Christ vers le  Royaume des cieux, afin que comme reine, elle pût se tenir à la droite du  Seigneur des Seigneurs, 'parée de l'or d'Ophir, entourée par une cours  nombreuse' (Psaume 45 (44), 10). C'est ainsi que l'Assomption de la Vierge eut  lieu vers la quinzième année qui suivit la mort du Christ. Mais Jean, quant à  lui, vécut encore jusqu'à l'époque de l'empereur Trajan. Quand Jean fut envoyé  en exil sur l'île de Patmos par l'empereur Domitien, un monstre d'une cruauté  atroce, la Très Sainte Vierge, qui était montée au Paradis le laissa vivre,  pour le bien de l'Église, dans cette vallée de larmes, selon la volonté du  Christ. Comme il savait que la Vierge était montée au ciel pour y être exaltée  à la droite du Christ, au-dessus de toutes les puissances célestes, Jean ne put  s'empêcher de se réjouir et d'exulter en son âme.
       Mais, privé de la douce conversation de la Vierge, ainsi que de  la consolation et du réconfort divins, il ne put pas non plus ne pas laisser  échapper larmes et lamentations quant à son sort. La Vierge n'ignorait pas du  tout la situation de Jean. Doit-on penser qu'elle l'oublia ? Comment  aurait-elle pu oublier celui qu'elle chérissait tendrement en son cœur de mère  comme si ce fut le Christ ?
       L'échanson ingrat de Pharaon oublia en prison Joseph qui était  innocent. Mais Marie ne pouvait pas oublier Jean. On peut donc fort bien penser  que la Très Sainte Vierge descendait souvent du ciel pour lui rendre visite et  le consoler, à la manière d'une mère qui a consolé son fils unique, un fils qui  ne manque pas de l'aimer en retour.
       III) Il semble que Jean ait voulu conserver la trace d'une  apparition particulière de la Vierge pour en faire un mémorial définitif quand  il écrivit : "Un grand signe apparut dans le ciel : une femme enveloppée  du soleil, la lune sous ses pieds et une couronne de 12 étoiles sur sa  tête." (Apocalypse 12, 1).
       Selon Épiphane, Bernard, Rupert et d'autres Pères encore, Jean  parle ici de la Vierge, Mère de Dieu. Jean lui-même semble le sous-entendre.  Non, en fait, il paraît bien avoir exprimé cette opinion le plus clairement du  monde, car il dit : "Elle enfanta un fils, qui doit paître toutes les  nations avec une verge de fer" (Apocalypse 12, 3). Par ces mots, c'est  sans aucun doute le Christ qu'il décrit, le Roi des rois et le Seigneur, le  Fils de Dieu, le seul engendré, le fils de la Vierge, Mère de Dieu. La Vierge,  Mère de Dieu, la mère du Christ, l'épouse de Dieu, la Reine du Ciel, la Reine  des Anges, apparut donc à Jean, vêtue de la gloire céleste, resplendissante de  la beauté et de la majesté divines : "Un grand signe apparut dans le  ciel".
       Par cette vision céleste, le Seigneur voulait montrer à Jean la  grande valeur de ce précieux trésor qu'il avait confié à sa garde, ce trésor  qui contient toutes les richesses et toute la gloire du ciel. A travers Jean,  Il désirait montrer à l'Église catholique universelle, c'est à dire à tous les  fidèles du Christ, combien la Vierge était exaltée au milieu des anges et des  élus du Paradis.
       Dieu agit ainsi de peur que nous pussions croire que Marie avait  été rejetée par Lui ; en effet, dans les Écritures Sacrées, l'Esprit Saint  avait fait la grâce à Marie de se sanctifier dans un certain effacement.
       IV) L'Écriture Sainte se montre étonnamment réservée et avare de  détails quand il s'agit de parler de la Vierge, il en est d'ailleurs de même  pour ce qui touche à la nature des anges et à la gloire du Paradis céleste.  Moïse, dans son récit des origines du monde, ne fait aucune mention de ces deux  derniers éléments. Il ne nous dit rien sur leur création, même si, sous  l'inspiration du Saint-Esprit, il raconte bien des choses au sujet de la  création du monde visible et du paradis terrestre, tout comme il le fait au  sujet de la formation de l'homme ; et c'est avec simplicité et véracité qu'il  raconte les nombreuses actions historiquement véridiques de Dieu et des hommes,  ceci afin de produire un témoignage qui traverserait les générations. Moïse  a-t-il eu du mépris pour les anges ou pour la création de la Jérusalem céleste,  alors même que leur Créateur, l'Artisan de leur existence, n'est autre que Dieu  ? Pourquoi donc a-t-il omis d'en parler ? La sagesse lui commanda de garder le  silence, car ce qu'il aurait pu dire dépassait la compréhension de notre esprit  et la capacité de notre intelligence. Epiphanus va dans le même sens quand dans  son Panarium, Haereses 78, il dit de la Vierge Mère de Dieu : "Les Écritures  restent silencieuses en raison de l'excellence du miracle, de peur que celui-ci  ne plonge l'esprit des hommes dans la stupeur." Aussi, les Saintes Écritures  ne disent-elles rien des parents de la Vierge ; elles ne disent rien non plus  de sa conception ou de sa naissance, contrairement à ce qui s'était passé pour  Jean Baptiste. Elles ne nous informent en rien sur l'âge de la Vierge, sa vie,  son caractère ou bien encore sa façon de vivre. Elles ne font même aucune  allusion à sa mort. C'est soudainement que la Vierge fait son apparition, à la  manière de Melchisédech, ce distingué prêtre de Dieu et Roi de Salem, lui dont  St Paul dit "qu'il était sans père, sans mère, sans généalogie, sans  commencement ni fin" (Genèse 14, 18 + Hébreux 7, 1-3), une affirmation  qu'il peut faire puisqu’aucun de ces renseignements ne figurent dans les  Saintes Écritures. C'est ainsi que la prêtrise fit son apparition, avec  majesté, comme si elle descendait du Ciel d'auprès de Dieu, ne tenant son  origine ni des hommes ni de la terre.
       Le silence, déclare le Prophète Royal, est louange à Dieu :  "Avec confiance, ô Dieu ! on te louera dans Sion." (Psaume 64, 1),  mais en Hébreu, nous avons : "Dans le silence, ô Dieu ! on te louera dans  Sion." En effet, comme rien de ce que l'on peut dire ne saurait constituer  une louange adéquate, il est préférable de s'émerveiller en silence devant le  divin plutôt que de bafouiller des mots pauvres et inadaptés ; c'est pourquoi  le Saint Esprit, qui inspira les saints hommes Dieu, voulut honorer la Mère de  Dieu dans ce silence sacré, ne révélant que cette vérité, à savoir qu'elle  était digne de devenir l'Épouse de Dieu pour concevoir et mettre au monde le  Fils unique de Ce dernier. La Très Sainte Vierge, en conséquence, fit son  entrée dans le monde non sans une certaine majesté divine : "L'Ange  Gabriel fut envoyé d'auprès de Dieu…vers une vierge…et quand l'ange fut près de  la Vierge il lui dit : Je te salue pleine de grâce, le Seigneur est avec  toi". (Luc 1, 26-28) Vraiment, "c'est un grand signe qui apparut dans  le ciel". Tout à coup, Marie surgit ; c'était comme une apparition divine  descendue du ciel, façonnée par la main experte de Dieu. Ève, la première mère  des vivants, avait été faite à l'image d'Adam, le premier homme, issu de la  terre. Marie, la femme céleste, a été faite à l'image du Christ, le deuxième  Homme, venu du ciel. Voilà pourquoi Jean déclare d'une voix forte : "un  grand signe apparut dans le ciel".
       V) Par cette vision céleste, Dieu souhaitait, autant que faire  se peut, montrer à la véritable Église les splendeurs divines dont Marie avait  été revêtues ; de même, Il désirait révéler aux fidèles les mystères que la  Vierge recelait.
  Ces révélations, Dieu les donna, afin que tous prissent  conscience, par les écrits la concernant, de la grandeur et de la magnificence  de la gloire dont elle avait été comblée.