La colère n’est pas mauvaise en soi. Saint Thomas d’Aquin va même jusqu’à dire que ne pas manifester de colère peut être un péché car dans certains cas, la raison appelle à se mettre en colère contre l’injustice et le mal.
Mais la colère demeure une émotion très fluctuante et dangereuse. Les chrétiens doivent être attentifs à la diriger de manière saine. Saint Augustin met en garde : « La colère, en séjournant dans le cœur, devient de la haine » et « nous devons veiller à ce que la haine de qui que ce soit ne pénètre pas dans notre cœur ». Saint Thomas d’Aquin rappelle pour sa part que la colère peut devenir un péché mortel si « à cause de l’impétuosité de [s]a colère », une personne « se détache de l’amour de Dieu et du prochain ».
C’est pourquoi il est trop facile d’excuser les accès impétueux en citant l’exemple de Jésus renversant les comptoirs des marchands du Temple ou de saint Nicolas frappant Arius au concile de Nicée (scène qui n’a d’ailleurs très probablement jamais eu lieu). De tous les péchés mortels, la colère apparaît comme celui que la plupart des chrétiens prend le moins au sérieux.
Si l’on a tendance à s’emporter facilement, il est nécessaire de réfléchir attentivement à ce que l’on fait entrer dans son esprit et dans son cœur par le biais des sens. Le Carême est une période propice pour prendre des habitudes qui nous éloignent des sources de colère et nous permettent d’aller vers la paix et la charité du Christ.
« La vie est trop courte pour que l’on baigne dans la colère des autres ». Grâce à cette règle d’or, j’ai décidé de ne plus suivre certaines personnes sur les réseaux sociaux, des personnes que j’apprécie et que j’admire mais dont les publications m’interpellent ou me mettent régulièrement en colère. Les attaques permanentes à l’encontre de personnes ou de groupes en particulier (Le pape François, la gauche, la droite… n’importe) sont source de division, elles ne mènent à rien et certainement pas à la sainteté. C’est une bonne chose de se tenir au courant de ce qui se passe dans notre monde, mais pas par l’intermédiaire de personnes au tempérament rageur ou d’informations rédigées de manière à nous faire enrager.
D’après Clément de Rome, une colère est saine quand « un individu s’indigne de lui-même et s’accuse des péchés qu’il a commis ». En d’autres termes, indignez-vous contre vos propres fautes ! Que votre colère contre les éléments de ce monde soit une source de motivation pour essayer, avec la grâce de Dieu, de contrôler ce qui est contrôlable, c’est-à-dire votre propre comportement. Comme l’a dit un jour le bienheureux Giacomo Alberione, fondateur de la Famille Paulinienne, « évitez ceux qui veulent que le changement vienne des autres. Les vrais changements commencent en disant mea culpa. »
Les réseaux sociaux, et plus globalement nos activités sur Internet, provoquent un nombre incalculable d’occasions de nous mettre en colère. S’éloigner des réseaux sociaux pendant le Carême pour accorder plus de temps à Dieu est une façon très efficace de limiter les risques. Souvent, quand j’arrive au terme de mon jeûne des réseaux sociaux, j’ai l’esprit plus clair et je me laisse moins facilement embarquer dans les débats houleux, les scandales, les médisances et la méchanceté.
Dans le Livre des Proverbes (12, 16), il est dit : « L’insensé manifeste, sur l’heure, son dépit. » Donc, quand vous êtes en colère et que vous éprouvez le sentiment de devoir répondre immédiatement à quelqu’un, sur les réseaux sociaux ou dans la vraie vie, ne le faites pas ! Arrêtez-vous, lâchez tout et priez. D’après Éphrem le Syrien, « les vertus sont formées par la prière » et « la prière met fin à la colère ». Autrement dit, la prière nous permet de prendre patience et de gérer notre colère avant qu’elle ne devienne source de péchés. Mieux vaut ne rien dire du tout que de dire quelque chose qu’il faudra ensuite confesser.
Les gens qui sont perpétuellement en colère souffrent souvent de problèmes sous-jacents, qui ne sont pas résolus et qui rejaillissent dans leur vie quotidienne. Pour chacun d’entre nous, que l’on soit d’une nature plutôt douce ou irascible, la colère est une réponse à un souci immédiat mais elle est souvent liée à quelque chose de plus profond. Parfois, quand je ressens de la colère, je vais à la chapelle et je dis à Jésus : « Je me sens en colère, pourquoi ? » La vitesse de sa réponse est toujours stupéfiante… Demandez à Jésus de vous aider à mettre à jour les racines de votre colère.
Pendant ce temps de Carême, essayons donc de faire en sorte que nos colères s’expriment plus sainement. Nos familles, notre Église, notre monde ne s’en porteront que mieux.
Source - Aleteia