SAINT HILAIRE, ÉVÊQUE ET DOCTEUR DE L'ÉGLISE

13 JANVIER

   Après avoir consacré à la gloire de l'Emmanuel manifesté à la terre la radieuse Octave de l'Épiphanie, la sainte Église, toujours occupée du divin Enfant et de son auguste Mère, jusqu'au jour où Marie portera dans ses bras ce fruit béni de ses entrailles au Temple où il doit être offert; la sainte Église, disons-nous, admet sur son glorieux Cycle de nombreux amis de Dieu, qui nous tracent au ciel, comme autant d'astres étincelants, la voie qui conduit des joies de la Nativité au sacré mystère de la Purification.
   Tout d'abord, éclate d'une gloire sans pareille, dès le lendemain du jour consacré à la mémoire du Baptême du Christ, le fidèle et courageux Hilaire, honneur immortel de l'Église des Gaules, le frère d'Athanase et d'Eusèbe de Verceil dans les combats qu'il soutint pour la divinité de l'Emmanuel. Le lendemain des persécutions sanglantes du paganisme, commence cette lutte affreuse de l'Arianisme, qui avait juré d'enlever
   1. Nous avons placé après le 31 janvier la fête de saint Tite, disciple de saint Paul. Cette fête, récemment inscrite au calendrier liturgique, n'a pas de jour propre. On la célèbre, dans les diverses Églises, au premier jour qui ne se trouve pas occupé par une autre fête. au Christ vainqueur, par ses Martyrs, de la violence et de la politique des Césars, la gloire et les honneurs de la divinité. L'Église, affranchie par son propre sang, ne fit point défaut sur ce nouveau champ de bataille; de nombreux Martyrs scellèrent encore de leur sang, versé par des princes désormais chrétiens, mais hérétiques, la divinité du Seigneur immortel qui a daigné apparaître dans la faiblesse delà chair; mais à côté de ces généreux athlètes, brillèrent, martyrs eux-mêmes de désir, d'illustres Docteurs qui vengèrent, par leur savoir et leur éloquence, cette foi de Nicée qui avait été celle des Apôtres. Au premier rang, et tout couvert des palmes d'une glorieuse confession, apparaît Hilaire, élevé, comme dit saint Jérôme, sur le cothurne gaulois et paré des fleurs de la Grèce, le Rhône de l’éloquence latine, et l’insigne Docteur des Églises, selon saint Augustin.
   Sublime par son génie, profond dans sa doctrine, Hilaire est plus grand encore dans son amour pour le Verbe incarné, dans son zèle pour la liberté de l'Église; toujours dévoré de la soif du martyre, toujours invincible à cette époque désolante où la foi, victorieuse des tyrans, sembla un jour au moment d'expirer, par l'astuce des princes, et parla lâche défection de tant de pasteurs.
Lisons d'abord le récit de quelques-unes des actions de notre grand Évêque, dans les Leçons de son Office.
   Hilaire, né en Aquitaine de famille noble, excella en doctrine et en éloquence. Engagé d'abord dans le mariage, il y mena une vie presque monastique; élevé ensuite, par ses rares vertus, sur le siège de Poitiers, il s'acquitta du devoir épiscopal de façon à mériter les plus grandes louanges de la part des fidèles. C'était dans le temps où l'Empereur Constance poursuivait les Catholiques par la terreur, la confiscation des biens, l'exil et les cruautés de tout genre, s'ils ne voulaient pas embrasser le parti des Ariens. Hilaire s'opposa, comme un mur inébranlable, à ces hérétiques, et attira sur lui leurs fureurs. Après plusieurs pièges qui lui furent tendus, il fut enfin, par les artifices de Saturnin, Évêque d'Arles, relégué, du Concile de Béziers, jusqu'en Phrygie, où il ressuscita un mort, et écrivit contre les Ariens ses douze livres de la Trinité.
   Quatre ans après, un Concile ayant été rassemblé à Séleucie, ville d'Isaurie, Hilaire fut contraint d'y assister. Il partit ensuite pour Constantinople, où voyant l'extrême péril de la foi, il demanda audience à l'Empereur par trois requêtes publiques, pour obtenir permission de disputer de la foi avec ses adversaires. Mais Ursace et Valens, Évêques ariens, que Hilaire avait réfutés dans ses écrits, craignant la présence d'un si savant homme, persuadèrent à Constance de le rétablir dans son évêché, comme pour lui faire honneur. Ce fut alors que l'Église des Gaules, selon l'expression de saint Jérôme, embrassa avec transport Hilaire au retour de ses combats contre les hérétiques. Il fut suivi jusqu'à sa ville épiscopale par saint Martin, qui fut ensuite Évêque de Tours, et qui, par les leçons d'Hilaire, s'avança dans les voies de l'admirable sainteté qui brilla plus tard dans sa conduite.
   Après son retour à Poitiers, Hilaire gouverna son Église dans une grande tranquillité. Par ses soins, la Gaule tout entière fut amenée à condamner l'impiété des Ariens. Il écrivit plusieurs livres d'une merveilleuse érudition. Saint Jérôme, dans sa lettre à Lasta, leur rend ce témoignage, qu'on les peut lire sans craindre d'y rencontrer l'erreur, lorsqu'il dit, en parlant de la fille de cette dame romaine: « Elle pourra lire, sans aucun risque, les livres d'Hilaire.» Il alla au ciel le jour des ides de janvier, sous l'empire de Valentinien et Valens, l'an de la Naissance de Jésus-Christ trois cent soixante-neuf. Un grand nombre de Pères et plusieurs Conciles ont désigné Hilaire comme un insigne Docteur de l'Église; et dans plusieurs diocèses, il était honoré sous ce titre; enfin, sur les instances du Concile de Bordeaux, le Souverain Pontife Pie IX, après avoir pris l'avis de la Congrégation des sacrés Rites, a déclaré et confirmé saint Hilaire Docteur de l'Église universelle, et ordonné qu'au jour de sa fête, il fût partout honoré de ce titre à l'Office et à la Messe.
   L'ancienne Église Gallicane, dans ses livres liturgiques dont quelques fragments sont venus jusqu'à nous, consacre les éloges suivants au plus illustre de ses Pontifes. Nous donnerons d'abord cette Allocution au peuple fidèle, extraite d'un antique Sacramentaire.

Dom Prosper Guéranger