CHEMIN DE CROIX



III. — JÉSUS TOMBE UNE PREMIÈRIE FOIS


   « Il sera un homme de douleurs et il connaîtra la fai­blesse »: Vir dolorum, scieras infirmitatem (Cf. Isa. LIII, 3). — Cette prophétie d'Isaïe s'accomplit à la lettre. Jésus, épuisé par les souffrances de l'âme et du corps, succombe sous le poids de la croix: la toute-puissance tombe de fai­blesse. Cette faiblesse de Jésus honore sa puissance di­vine. Par elle, il expie nos péchés, il répare les révoltes de notre orgueil et « relève le monde impuissant à se sauver »: Deus qui in Filii tui humilitate jacentem mundunz erexisti (Oraison du IIe Dim. après Pâques)... De plus, il nous méritait à ce moment la grâce de nous humilier de nos fautes, de reconnaître nos chutes, de les avouer sincèrement; il nous méritait la grâce de la force qui soutient notre faiblesse.
   Avec le Christ prosterné devant son Père, détestons les élèvements de notre vanité et de notre ambition; re­connaissons l'étendue de notre faiblesse. Autant Dieu accable les superbes, autant l'humble aveu de notre infirmité attire sa miséricorde: Quomodo miseretur pater filiorum... quoniam ipse cognovit figmentum nostrum (Ps. CII, 13-14). Crions miséricorde à Dieu dans les moments où nous sentons que nous sommes faibles en face de la croix, de la tentation, de l'accomplissement de la volonté divine: Miserere mei, Domine, quoniam in firmus sum (Ibid. VI). C'est en proclamant alors humblement notre infirmité qu'éclatera en nous le triomphe de la grâce qui, seule, peut nous sauver: Virtus in infirmitate perficitur (Cor. XII, 9).

   Ô Christ Jésus, prosterné sous votre croix, je vous adore. « Force de Dieu » (Cor. I, 21), vous vous montrez accablée de faiblesse pour nous apprendre l'humilité et confondre nos orgueils. « Ô pontife, plein de sainteté, qui avez passé par nos épreuves afin de nous ressembler et de pouvoir compatir à nos infirmités » (Hebr. IV, 15), ne m'abandonnez pas à moi-même, car je ne suis que faiblesse; « que votre force demeure en moi », afin que je ne succombe pas au mal: Ut inhabitet in me virtus Christi (II Cor. XII, 9).