Saint Henri,
empereur et confesseur
Patron des oblats

- Fête le 13 juillet -


Saint Henri II - Empereur du Saint Empire romain germanique, mort en 1024


Tout resplendissant de l’auréole céleste qu'il a su joindre à son diadème terrestre, le puissant et pieux empereur Henri apparaît aujourd'hui sur le cycle. Saluons en sa personne un des types les plus glorieux de ces princes, véritables pères de la république chrétienne, dont le Christ fit don à son Église dans les temps passés; et apprenons de lui combien est vraie la parole du saint Évangile: " Cherchez d'abord le royaume de Dieu et sa justice, ce royaume qui est au-dedans de vous, et tout le reste vous sera donné par surcroît." Rien ne semble manquer à sa gloire devant le monde: ni les sages institutions qui font les grands législateurs, ni les éclatantes victoires qui peuvent donner un nom dans la carrière des armes. Bien plus, lorsque le pontife Benoit VIII, avant d'introduire le roi de Germanie dans la basilique de Saint-Pierre, où il devait le couronner empereur, lui demanda s'il voulait être le protecteur de l'Église, Henri le jura; et nul prince ne donna jamais de plus grandes preuves de la fidélité à son serment; les nombreuses fondations monastiques, les nouveaux évêchés fondés ou richement dotés, toutes les entreprises de foi encouragées et soutenues: tout démontre les avantages immenses qui devaient résulter pour la société chrétienne du long règne d'un empereur tel qu’Henri. Le ciel lui-même, en lui procurant une guérison inespérée devant le tombeau de saint Benoit, semble reconnaître le prix de sa vie un moment menacée.


Et cependant, bien autre est la préoccupation du puissant monarque. Dès sa jeunesse, il a fait voeu de continence perpétuelle, sacrifiant ainsi tous les avantages qu'aurait pu retirer l'Église de la descendance d'un prince aussi puissant que chrétien. S'il a cédé enfin aux représentations des prudents de la terre, dès le soir même du mariage sa virginale épouse a écouté avec joie la voix du jeune prince, qui l'invite à des noces immaculées. Mais ce n'est pas encore assez ; même au faîte des honneurs et de la sainteté, l'âme d'Henri, plus vaste que le monde, s'y trouve à l'étroit, elle aspire à le quitter pour entrer dans le cloître. Dans la basilique Vaticane, le César chrétien venait de recevoir des mains du Pontife romain le globe d'or surmonté de la croix et orné de pierres précieuses, lorsque, après l'avoir attentivement considéré: "Très bon Père, dit-il à Benoit VIII, vous avez voulu par cet emblème m'apprendre comment je dois user de la dignité nouvelle qui m'est conférée et gouverner notre commune monarchie... Cependant cette croix surmontant le globe du monde ne conviendrait véritablement qu'à ceux qui ont foulé aux pieds les pompes de la terre pour mieux porter la croix du Sauveur." Et le soir même du sacre, le globe impérial était envoyé à Cluny pour être offert au saint abbé Odilon. Quelque temps après, Henri se trouve lui-même à Cluny; et après avoir fait don, durant la messe solennelle de la saint Pierre, de la couronne et du sceptre impérial, il ne consent à quitter le monastère qu'après s'être vu associé à la communauté sainte, et s'être recommandé en toute humilité et contrition de coeur aux prières des moines.


Une autre fois, il a pu obtenir une entrevue du vénérable vieillard saint Romuald. "Ah! s'écrie-t-il en voyant le saint abbé, plût à Dieu que mon âme habitat le corps de ce saint!" Enfin, Henri crut le moment venu d'accomplir son pieux dessein. Un jour, se trouvant dans le cloître de Saint-Vannes, il s'écria: "C'est ici le lieu de mon repos, voilà la demeure que je me suis choisie." Et, incontinent il supplie le bienheureux Richard de le recevoir parmi ses moines. Le vénérable abbé est obligé d'avoir recours à un pieux expédient. On sonne la cloche du chapitre; tous les religieux s'assemblent; l'empereur introduit paraît devant eux dans le maintien le plus humble. L'abbé lui demande quel désir l'amène. Henri proteste qu'il a résolu de quitter les vanités du siècle pour servir Dieu jusqu'à la mort dans le monastère. — "Voulez-vous donc, dit l'abbé, pratiquer l'obéissance comme Jésus-Christ l'a enseignée ?" — "Je le veux, dit Henri, et avec la grâce de Dieu j'espère tenir fidèlement ma promesse." — "Soit, dit Richard après un moment de réflexion; je vous admets au nombre de mes moines; mais vous m'obéirez ponctuellement en toutes choses!" — "Je le jure, répondit le prince." — "Eh bien ! reprit le vénérable abbé, je veux et j'ordonne que vous repreniez le gouvernent de l'Empire confié à vos soins par la Providence. Je ne doute point que vous ne vous acquittiez loyalement de ce premier office que vous enjoint l'obéissance monastique."


Le nouveau moine obéit; il avait compris, et nul doute qu'un nouveau et splendide joyau n'ait enrichi depuis lors la couronne que les anges lui tressaient au ciel. Puissant empereur, héros magnanime, nous applaudissons à votre gloire et nous réclamons humblement vos suffrages en faveur de ces restes démembrés mais encore vénérables du saint Empire dont vous fûtes le défenseur et le père. Faites voir aux princes et aux rois qui nous gouvernent que l'Église du Christ et ses phalanges monastiques, loin d'être un obstacle et un sujet d'ombrage pour leur couronne, en sont le plus ferme appui et la sauvegarde la plus assurée. Protégez particulièrement, ô Henri, les fils du bienheureux Benoit qui vous combla de ses faveurs ; couvrez de votre céleste protection tous ceux qui, à des degrés divers, tiennent comme vous à s'agréger à l'Ordre renaissant du glorieux patriarche; ceux-là surtout qui trouvent dans leur généreux dévouement le moyen d'accomplir des œuvres dignes des richesses et de la puissance des rois et des empereurs. Enfin, vaillant défenseur de l'Église, humiliez les ennemis de notre Mère, et obtenez que la paix soit rendue à nos temps malheureux.

Revue bénédictine, Tome I, p.151-153